La start-up d’Aix-en-Provence, @-Health, spécialisée dans la prévention des AVC, s’est donnée pour objectif d’allier intérêt économique et médical, et cela en poursuivant une démarche sociétale. La prestation proposée par la structure, CardioNexion, est tout simplement révolutionnaire puisque elle associe un dispositif médical unique connecté (fixé sur un vêtement et des brassières) à un système d’évaluation en temps réel des risques de pathologies cardiovasculaires.
Pierre-Paul Goiffon, Directeur général de @-Health, et accessoirement spécialiste du management de l’innovation, nous offre les contours d’une aventure qui s’est très vite concrétisée.
Cityramag : Pouvez-vous revenir s’il vous plaît sur la genèse du projet ?
P.P Goiffon : Lors d’un dîner début 2014 avec un ami cardiologue aixois, le docteur Tarvet, nous avons évoqué plusieurs sujets médicaux et notamment la problématique des accidents cardio-vasculaires. Nous nous sommes alors focalisés sur les AVC, qui je vous le rappelle, cause la mort de 30 000 personnes chaque année rien que sur le sol français.
L’idée était alors de concevoir un système textile connecté H24, 365 jours sur 365, permettant aux cardiologues de bénéficier d’un suivi constant du rythme cardiaque de leurs patients, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, afin de prévenir tout risque d’AVC. Cette démarche est également personnelle, car j’ai moi-même subi un AVC à l’âge de 39 ans et ma famille en a aussi fait les frais.
Pour autant, nous nous sommes très vites heurtés aux regards dubitatifs de certains experts persuadés que ce projet était impossible à mettre en oeuvre. Du coup, on lui a donné vie.
Cityramag : Concrètement, comment fonctionne votre dispositif ?
P.P Goiffon : Notre système s’intègre directement dans la garde-robe du CardioNecté et offre une surveillance discrète du rythme cardiaque du patient. Nous proposons ainsi une technologie qui permet d’obtenir un dispositif totalement intégré quel que soit la nature et l’usage du vêtement ou sous-vêtement afin de ne pas en modifier l’usage. J’insiste sur ce dernier point car nous n’avons pas vocation à devenir des professionnels du textile. Nous souhaitons travailler avec tout le monde et ne fermer aucune porte.
Par la suite, les signaux cardiaques (Électrocardiogramme ou ECG) sont cryptés et anonymisés (obligation liée au droit européen) depuis leurs points d’origine : le capteur @-Health. Ils sont ensuite transmis en temps réel, par l’intermédiaire d’un smartphone, vers les serveurs sécurisés CardioNexion qui analysent l’information grâce à un algorithme (breveté) mis au point par notre équipe.
De ce fait, en cas de détection d’anomalie, une alerte est immédiatement envoyée au CardioNecté, ainsi qu’à son médecin traitant, cardiologue ou toute personne de son choix selon des instructions préalablement établies. L’intéressé sera alors pris en charge bien en amont. De nombreuses personnes peuvent donc être sauvées par ce biais.
Cityramag : Comment s’orchestre votre modèle économique ? La sécurité sociale et les mutuelles vont-elles vous suivre ?
P.P Goiffon : En raison de la crise tenace qui tord le cou à l’Hexagone, les remboursements de « la sécu » se sont peu à peu mués en véritable parcours du combattant. Il faudrait des mois voire des années avant d’obtenir des garanties viables sur ce dossier. Nous avons donc pris les devants en proposant notre tee-shirt pratiquement à prix coûtant (150 euros). Quant à l’abonnement qui va avec, il est facturé 48 euros par mois.
La problématique des mutuelles est, elle, bien différente, puisque une véritable réflexion a été engagée avec certaines structures très intéressées par la sphère de la santé connectée; un concept encore assez jeune mais très ambitieux.
Notre vocation est véritablement de s’inscrire dans une démarche sociétale en apportant la première brique à même de faire passer un palier à la médecine préventive vers une médecine prédictive. Notre but est de convaincre les mutuelles de prendre en charge des pathologies dites asymptomatiques, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui.
Cityramag : Quelles sont vos cibles en matières de clientèle ?
P.P Goiffon : Nous visons en premier lieu les cardiologues qui se situent à la base de notre système de protection. Ce sont eux qui vont sensibiliser leurs patients sur les risques liés au fléau qu’est l’accident vasculaire cérébral. Il vont en conséquence pouvoir les aiguiller et leur conseiller, le cas échéant, notre solution. Nous travaillons parallèlement avec un collège de cardiologues qui travaille sur les bons usages du métier et le perfectionnement du matériel. Cette association légitime d’autant plus notre démarche.
Par ailleurs, nous sollicitons les industriels de la santé et beaucoup se sont déjà montrés séduits par notre savoir-faire en France mais aussi à l’international (Allemagne, Chine, USA-opérateur téléphonique, pour ne citer qu’eux).
Globalement, c’est l’ensemble des acteurs du secteur que nous cherchons à convaincre. Cela peut être une maison de retraite, une mutuelle ou encore un réseau de maintien à domicile (pour les personnes éloignées). Cette liste est toutefois loin d’être exhaustive.
Propos recueillis par Mathieu Portogallo