Romain Berrada (22 ans) et Franck Le Dortz (44 ans), respectivement ingénieur en électronique et designer, ont lancé Smart pantoufles en avril 2016. Cette jeune start-up rennaise s’est engouffrée dans une niche de la silver économie : la création d’un dispositif de semelles connectées qui détectent les chutes des personnes âgées. Si le concept est encore en phase de développement, il n’en reste pas moins ambitieux économiquement mais aussi socialement; une double casquette chère au premier nommé.
Cityramag : Bonjour Romain, pouvez-vous évoquer la genèse du projet Smart pantoufles s’il vous plaît.
R.B : L’aventure a réellement commencé au printemps 2016 lors d’un hackathon spécialisé dans « le bien-vivre à domicile ». Nous étions six à bosser sur le projet de semelle connectée avec pour objectif de rendre efficient la surveillance des personnes âgées qui vivent encore chez elles.
Il arrive en effet très souvent que des gens soient retrouvés deux ou trois jours après une chute dans des états critiques; une mauvaise habitude démontrant que certains systèmes déjà existants sont insuffisants pour permettre à leurs proches de recevoir une alerte de qualité en cas d’accident.
Par la suite, nous sommes deux à avoir peaufiné le travail entrepris. Actuellement, nous nous occupons de terminer le prototype avant de tester la semelle en fin d’année, d’abord à notre niveau, puis dans plusieurs EHPAD d’Ille-et-Vilaine grâce à l’intervention d’un élu du département.
Cityramag : Justement, comment fonctionne ce dispositif ?
R.B : Avant toute chose, notre vocation est de vraiment mettre à l’aise les seniors qui souhaitent nous rejoindre. Notre semelle reste très discrète puisqu’elle se glisse dans le chausson et ne se voit pas. Par ailleurs, notre objectif est d’apporter plus de sécurité et de quiétude aux familles.
D’autre part, comme je l’ai dit, les bracelets ou colliers prévenant les chutes présentent trop de défauts majeurs, à commencer par une sensibilité trop prononcée sur la verticalité du choc. De fausses alertes ont été constatées à maintes reprises lorsque « le patient » s’allonge ou touche un meuble. Sachant que les proches sont prévenus immédiatement, les déplacements « de vérification » peuvent être parfois inutiles.
Notre système se focalise quant à lui sur la pression et l’orientation du pied via des capteurs. De ce fait, nous serons par exemple en mesure de détecter que la personne est passée en position assise. Il n’y aura donc pas de déclenchement d’alerte par téléphone ou sms. Concrètement, nous souhaitons absolument éviter le premier accident.
« Si notre intérêt est économique, il n’en demeure pas moins social »
Cityramag : Quel modèle économique allez-vous choisir ?
R.B : Nous ciblons dans une premier temps les EHPAD et les maisons de retraite. Par la suite, nous nous attaquerons aux particuliers en leur proposant le produit dans les standards des prix en vigueur sur les objets connectés. L’offre comportera également un abonnement dont le montant reste aussi à fixer.
Il est important de noter que si notre intérêt est économique, il n’en demeure pas moins social. Nous souhaitons ainsi recueillir des données sur la marche de la personne, et notamment sa dégradation, afin de les transmettre par la suite à des podologues. Cette collaboration permettra d’améliorer « pas à pas » notre technologie.
Cityramag : Vous êtes encore dans la phase de développement, sur quels leviers vous appuyez-vous actuellement pour faire prospérer votre projet ?
R.B : Pour le moment, nous nous attachons à densifier notre réseau dans lequel la French Tech et la technopôle de Rennes occupent une place de choix. Comme toute jeune start-up, nous cherchons à gagner en rayonnement et les concours nous offrent cette passerelle.
Ce fut le cas avec le Digital Impact (décembre 2016) dont nous sommes sortis lauréat. La finale du SwitchUp Challenge (juin 2016), organisé par l’Américain Cisco, nous a aussi permis de franchir un cap que ce soit financièrement (aide de 15 000 € et d’un matériel de la valeur de 20 000 € + accompagnement par des professionnels) ou médiatiquement.
Propos recueillis par Mathieu Portogallo