Le concept de smart city est-il uniquement réservé aux métropoles ou aux grandes villes ? Les plus petits territoires ne peuvent-ils pas, eux aussi, prendre part à ce mouvement ? Telle est la question que s’est posé Cédric Verpeaux sur le site de la Caisse des Dépôts, dans la rubrique « Territoires intelligents ».
« Les grandes agglomérations et métropoles se sont d’ores et déjà saisies du numérique pour optimiser leurs services : lieux d’innovation, nouvelles mobilités, éclairage intelligent, gestion innovante de l’eau et des déchets… (Mais) qu’en est-il pour les plus petites communes ? Si leurs élus et décideurs ont conscience que le numérique peut aider à améliorer la gestion des services et à renforcer l’attractivité du territoire, ils ignorent encore souvent de quelle manière et pointent notamment des carences en termes de sensibilisation, ingénierie et financement. »
Devant ce postulat, la Caisse des Dépôts et deux associations (APVF et ADCF) ont donc sondé une centaine de collectivités hexagonales afin de « de dresser un panorama des besoins et initiatives locales lancés par de « petites villes ». C’est-à-dire les villes centre d’une intercommunalité et comptant entre 8 000 et 25 000 habitants ».
Une stratégie numérique d’ensemble à peaufiner
– Deux constats clés peuvent ainsi en être dégagés : « D’une part, la question des infrastructures numériques reste centrale et prioritaire par rapport au développement de services numériques. Près de la moitié des enquêtés (élus et Directeurs Généraux des Services) estime en effet que le Très Haut Débit (THD) constitue une priorité. Viennent ensuite les premiers besoins essentiels et souvent obligatoires comme la dématérialisation et l’e-administration. Mais lorsque ces villes développent des solutions numériques plus innovantes, c’est d’avantage au coup par coup et par opportunisme, sans avoir établi au préalable de stratégie numérique d’ensemble ».
– Mais aussi beaucoup de questions techniques nécessitant une expertise et une ingénierie qui manquent souvent dans les petites villes :
- Un investissement dans un service urbain « smart » peut en effet être coûteux, mais quelle est l’assurance sur un potentiel retour sur investissement ?
- Un service innovant parait séduisant mais quel est le risque d’obsolescence à court ou moyen termes ? Quels sont les niveaux de compatibilité et d’interopérabilité avec d’autres technologies et services déjà installés dans la ville ?
- La population acceptera-t-elle les changements ? Enfin, pour les projets les plus matures, quid de la propriété et de l’usage des données ?
… Sachant qu’en parallèle les secteurs désignés comme prioritaires (eau, déchets, éclairage…) ne reçoivent pas toujours l’attention qu’ils devraient normalement avoir, confirme l’étude.
Former et sensibiliser
Logiquement, Cédric Verpeaux propose que les efforts communaux se concentrent en premier lieu sur les fondations du projet smart. Et cela, dans le but de ne pas griller les étapes :
1) « Sensibiliser. Autrement dit, associer les petites villes et leurs EPCI aux débats autour du numérique et de ses enjeux, mettre à leur disposition des moyens d’informations réguliers afin de les encourager à mieux connaître les solutions qui existent et à adopter une stratégie numérique globale (notamment en ayant une meilleure connaissance des retours sur investissement). En termes de financement, les différents dispositifs de soutien existants et notamment les fonds régionaux, nationaux ou européens en faveur du développement numérique, doivent également être identifiés et mieux utilisés par ces collectivités ».
2) « Former. En parallèle de cette nécessaire information des élus et décideurs, il semble aussi indispensable de permettre le développement d’une ingénierie interne, donc de former des agents pour concevoir et piloter la mise en place de nouveaux services numériques et être en mesure de faire les meilleurs choix parmi les solutions du marché ».
Mutualiser les ressources
Pour autant, une donnée fondamentale, et pas des moindres, doit toujours rester à l’esprit des décideurs. A savoir la problématique du financement qui nécessitera une véritable coordination des forces locales :
« Sur nombre de ces points, les petites villes et leurs intercommunalités se trouvent souvent seules et démunies, financièrement ou en termes d’ingénierie. Les dispositifs de mutualisation entre collectivités, à des niveaux départementaux ou régionaux, peuvent être une solution même s’ils sont aussi complexes à mettre en œuvre, notamment par leurs montage et gouvernance. Et nécessitent dans tous les cas une volonté politique forte, au-delà des « concurrences » entre territoires. Cette mutualisation peut aussi permettre de faciliter l’approche commerciale des acteurs privés porteurs de solutions en leur offrant des marchés plus accessibles et plus rentables. »