Si les start-ups témoignent généralement d’un état d’esprit plus décontracté et à contre-courant des modèles structurels classiques, elles ne doivent cependant pas se retrouver prisonnières « d’un syndrome Peter-Pan » au moment de s’émanciper… Sous peine de risquer la sortie du route. C’est ce que confirme Flore Pradère, responsable Recherche Entreprises France chez JLL, auprès de nos confrères du Figaro.
« Au début, une start-up, c’est beaucoup d’improvisation, de bricolage… C’est tout sauf « corporate » ! Ce dernier adjectif est d’ailleurs la hantise des start-upper qui se revendiquent anti-institutionnels et veulent échapper aux normes ! C’est un état d’esprit qui marche au début. Mais dès lors qu’une jeune pousse grandit – très vite – il arrive un moment où ça bloque… C’est inévitable. »
F. Padère, forte d’une expérience avec Blablacar, Snapchat ou La Ruche, persiste et signe, les entreprises en devenir doivent impérativement se structurer pour durer. Si une certaine fraîcheur organisationnelle marche au début de l’aventure, elle peut devenir un véritable talon d’Achille à moyen et long terme :
« Lorsqu’il y a une ou plusieurs levées de fonds successives, et des vagues de recrutement massives, on ne peut plus se permettre de faire du bricolage. Si une start-up est tentée d’investir tout son cash sur ses produits, il arrive un moment crucial où elle est obligée de se pencher sur la logistique et (repenser son mode de fonctionnement) ! Il faut alors réfléchir et investir dans un environnement de travail propice au développement (…) Sinon, cela donne lieu à des situations ubuesques où les collaborateurs se retrouvent avec 3 mètres carrés par personne, ou bien au « co-homing », une situation dans laquelle l’un des collaborateurs érige son propre domicile en siège de l’entreprise. Ces organisations improvisées qui rappellent le film « L’Auberge espagnole » peuvent marcher dans un premier temps, mais elles ne peuvent pas s’éterniser… »
L’intéressée conseille donc vivement aux start-ups de réussir leur mue :
« Le virage organisationnel est un élément essentiel. Et cela, à plusieurs niveaux ! Les start-ups ont compris qu’investir dans un espace de travail – lorsqu’elles en ont les moyens – est utile parce que ce dernier constitue leur vitrine, leur showroom grâce auquel elles peuvent communiquer. C’est un espace qui leur ressemble, qui met en avant leur(s) singularité(s). Leurs bureaux cultivent leurs différences avec les autres. C’est également un signe positif pour les investisseurs, qui eux ne sont pas des bricoleurs… C’est un gage de crédibilité ! C’est un pari sur l’avenir où il s’agit de mûrir sans travestir la fraîcheur des débuts. »
… Mais sans griller les étapes :
« Elles doivent néanmoins conserver une (option) de repli. Parfois, certaines start-up sont trop ambitieuses ! Et d’une situation où l’on manque de place, elles se retrouvent à en avoir beaucoup trop. Il faut également que le projet de déménagement fasse l’unanimité chez les collaborateurs. Et ce n’est pas simple, car tout comme les bureaux, le management est un sujet tabou dans une start-up. Tout ce qui touche à la norme est tabou ! »