En France, seuls 2,9 % des actifs se rendent au travail à bicyclette. EDF, La Poste, la SNCF ou encore Matmut tentent d’inverser la tendance, pour favoriser le développement de mobilités professionnelles plus douces.
Autorités locales, établissements d’enseignement, entreprises et organisations non gouvernementales se sont donné rendez-vous du 16 au 22 septembre derniers à l’occasion de la 20e Semaine européenne de mobilité. Leur objectif : inciter les collectivités et citoyens européens à opter pour des modes de déplacements plus respectueux de l’environnement. De quoi concilier enjeux sanitaires (la sédentarité est un fléau) et environnementaux.
Le développement des mobilités actives
Il faut dire que le moment est propice. Comme le rappelle le groupe EDF, le transport est en France le premier secteur émetteur de CO2, particulièrement du fait des voitures individuelles thermiques, qui représentent plus de 70 % des trajets domicile-travail. L’énergéticien, qui souhaite être leader de la mobilité électrique dès 2022, a d’ailleurs signé en novembre 2019 un accord avec les organisations syndicales sur la mobilité durable pour ses salariés. Il s’agit de favoriser les mobilités douces par l’usage des transports respectueux de l’environnement, du covoiturage, du vélo ou de la marche lors des trajets domicile-travail et des déplacements professionnels. « Chez EDF, nous sommes attentifs à conjuguer qualité de vie, performance et impact réduit en CO2, ce qui se traduit notamment par un plan de mobilité employeur déployé à l’échelon local pour prendre en compte les spécificités territoriales ainsi que le lien avec les collectivités locales. 61 plans de mobilité ont été élaborés depuis fin 2019 sur près de 130 sites de plus de 100 salariés. » détaille Christophe Carval, directeur des ressources humaines du Groupe.
Des objectifs sans doute ambitieux mais nécessaires. Selon les données prépandémiques de l’Insee, seuls 2,9 % des actifs se rendent au travail à bicyclette en France, et 6 % dans les agglomérations. Une belle occasion pour les entreprises d’encourager l’usage des modes de transport plus respectueux de l’environnement et de la santé. Ainsi, tandis que le groupe EDF met en place un forfait mobilité durable à l’attention des salariés qui font du covoiturage, un kit de sécurité (chasuble, casque et écarteurs de danger) destiné aux cyclistes et des tarifs négociés pour l’achat de vélos, de véhicules électriques ou hybrides rechargeables, La Poste permet à ses collaborateurs de tester le vélo électrique pour leurs trajets quotidiens grâce au dispositif GoodWatt. Déjà mis en place à Nantes, Grenoble, Rennes, Lille et Lyon, GoodWatt arrive à Strasbourg. Conçu par Mobilités Demain, une entreprise dédiée aux mobilités durables, le dispositif accompagne les salariés dans la découverte et le test d’un vélo à assistance électrique pour leurs trajets domicile-travail pendant un mois.
Fin du télétravail : une nouvelle hausse des émissions de CO2 ?
À Paris, les aides financières pour inciter à des mobilités propres se multiplient. Environ 400 euros pour un vélo à assistance électrique neuf ou un deux-roues motorisé électrique, 600 euros pour un vélo cargo, un bouquet de mobilités plafonné à 600 euros en échange de l’abandon d’un véhicule personnel… Sans compter les aides destinées aux syndics et bailleurs sociaux qui investissent dans l’installation de bornes de recharge et celles destinées aux petites entreprises qui souhaitent encourager leurs employés à s’équiper de vélos ou de deux-roues motorisés électriques.
Bref, les initiatives sont nombreuses et encourageantes. Mais sont-elles menacées par la fin du télétravail ? Le retour au bureau fait craindre une nouvelle hausse des émissions de CO2 et un retour en arrière en matière de pollution. Alors, que faire ? Pour les entrepreneurs les plus optimistes, l’heure est enfin venue de faire décoller le covoiturage courte distance. Si les conducteurs sont moins enclins à faire des détours sur leurs trajets du quotidien, certains acteurs innovent pour changer la donne. Klaxit et Ecov, deux start-ups leaders dans le secteur, proposent à ce titre des « garanties retour » pour assurer à leurs passagers qu’ils pourront rentrer même si leur conducteur leur fait faux bond.
Le financement par les collectivités des trajets en covoiturage au même titre que les lignes de bus, les métros et les trams est également jugé indispensable par les professionnels du secteur. Grâce à la loi d’orientation des mobilités (LOM), entrée en vigueur en 2020, le conducteur est rémunéré entre 10 et 60 centimes le kilomètre. Le passager, lui, paye l’équivalent d’un ticket de bus, parfois moins. C’est un bon début, mais on peut aller plus loin : « Si le pass Navigo des Franciliens n’était pas subventionné, il leur coûterait au moins 500 euros par mois », rappelle Julien Honnart de Klaxit.
Place à l’innovation
En attendant, certaines entreprises ont décidé de soutenir le covoiturage courte distance. Depuis 2020, la centrale nucléaire EDF du Bugey est partenaire du réseau de covoiturage Covoit’Ici, une plateforme qui reprend les codes des transports en commun pour proposer à ses clients un service « aussi simple, pratique et fiable qu’une ligne de bus ! ».
La jeune pousse Ze-Watt, spécialiste de la recharge des véhicules électriques, a de son côté noué des partenariats avec Airbus, L’Oréal, Orange et Safran. « Quand nous nous sommes lancés, notre volonté était d’apporter une solution clé en main aux employeurs et aux entreprises. Notre offre va ainsi de la fabrication des bornes de recharge pour véhicules électriques à l’installation, en passant par la gestion et la maintenance de ces équipements », résume Éric Gaigneux, président et fondateur de Ze-Watt.
Alors que l’épidémie semble enfin reculer, force est de constater que la crise du Covid aura été un laboratoire d’expérimentations. Selon le cabinet Robert Half, la tendance mondiale est aujourd’hui au télétravail et au travail hybride. Celui-ci est considéré comme un élément permanent du marché du recrutement par 87 % des managers. Le nombre d’offres d’emploi en télétravail a à ce titre augmenté de 259 % de mars à novembre 2020. En France, 86 % des entreprises ont reçu des demandes de télétravail lointain de la part de leurs salariés et 74 % d’entre elles ont validé ces demandes.
Devant cette dynamique, la SNCF a mis en place un « forfait télétravail » : 250 trajets par an du lundi au jeudi sur toutes les destinations de TGV Inouï et Intercités, toujours sur la même ligne domicile-travail. Chez Matmut, un accord sur le télétravail a été mis en place récemment. L’assureur a équipé l’ensemble des salariés de matériel informatique nomade. « L’esprit de l’accord est de laisser la liberté aux managers et collaborateurs de s’organiser, dans le respect du bon fonctionnement de l’activité », précise-t-on chez Matmut. L’assureur précise par ailleurs que « les infirmières de l’entreprise ont aidé et continuent d’aider nombre de salariés, lors de visites d’information et de prévention, à s’installer correctement à domicile ». Il s’agit en effet de marier souci environnemental et souci de soi.