Éloignée des transports collectifs comme des logements neufs, la France « périphérique » sera aussi la plus affectée par les conséquences du dérèglement climatique. Pour lutter contre les inégalités à l’œuvre dans les territoires, les acteurs publics comme privés se mobilisent dans une double optique sociale et écologique.
Éloignés des grandes villes, dépendants de leurs voitures et du chauffage individuel, les Français qui vivent loin des grandes métropoles subissent depuis plusieurs semaines la hausse des prix des matières premières. Souvent laissés en marge de la transition énergétique ou de la croissance économique, ces territoires ont aussi été les grands oubliés de la dernière élection présidentielle.
Globalement absents des débats et des réflexions programmatiques, les territoires de la France périphérique ont en effet été abordés au strict minimum par les différents candidats. Car ces territoires dits de la France « périphérique », cumulant les difficultés des zones urbaines et des zones rurales, n’ont pas eu la chance d’entendre de nouvelles propositions concrètes et réalistes répondant à leurs besoins.
Ces zones géographiques concentrent pourtant près de 60% des Français et seront en première ligne face aux conséquences du changement climatique, des tensions sociales et de la transition énergétique. Heureusement, un regain d’initiatives visant à les soutenir et à les dynamiser émerge, tant du secteur privé que des pouvoirs publics.
La Banque Postale, le Crédit Coopératif… : les acteurs financiers au chevet des territoires
Alors que les partis politiques peinent à faire émerger une vision cohérente du développement de ces territoires, les initiatives jaillissent du côté du secteur privé et, singulièrement, de la part des acteurs financiers. À l’image de La Banque Postale qui, avec son nouveau « Prêt Avance Rénovation » lancé début février 2022 répond à l’impulsion gouvernementale en la matière. Objectif ? Faciliter la rénovation énergétique des logements des ménages modestes ou âgés — une illustration supplémentaire du caractère indissociable des enjeux sociaux et environnementaux. Prolongeant l’engagement pris en 2021 par La Banque Postale dans le cadre du plan gouvernemental de transition écologique, le Prêt Avance Rénovation a vocation à aider les ménages concernés à financer le « reste à charge » des travaux de rénovation des « passoires thermiques » — on en dénombrerait pas moins de 4,8 millions dans l’Hexagone.
L’offre « illustre notre volonté d’accompagner la transition juste de notre société », explique sur le site internet de la banque, Philippe Heim, président du directoire, « en permettant à des personnes exclues des solutions de financement classiques (…) d’être acteurs de la transition énergétique et d’améliorer leur quotidien ». Une démonstration, pour le dirigeant, que « l’engagement climatique peut se conjuguer avec l’inclusion de nos concitoyens les plus fragiles ».
En 2019, le dispositif d’investissement EnRciT (prononcer « énercité ») avait, quant à lui, en partenariat avec l’ADEME, l’Ircantec et le Crédit Coopératif, initié une action de soutien aux projets citoyens en matière d’énergies renouvelables. EnRciT avait notamment investi 35 000 euros dans un projet de parc éolien situé à Saint-Vincent (Seine-et-Marne), ainsi que 46 000 euros dans une installation solaire sur la commune de Jausiers (Alpes-de-Haute-Provence).
Les acteurs étatiques en renfort
Transition écologique, transformation numérique, nouvelles mobilités, réindustrialisation, logement, alimentation… : « ces axes de la redynamisation des territoires poussent les acteurs locaux à développer une véritable ingénierie territoriale afin de multiplier les projets tout en cherchant à les rendre cohérents par la concertation entre toutes les parties prenantes », se félicite ainsi le député de la Vienne, Jacques Savatier.
Des parties prenantes au premier rang desquelles, malgré tout, l’État, en tant que catalyseur et accélérateur des initiatives locales, conserve un rôle central. Dotés de plusieurs centaines de millions d’euros, les programmes « Territoires d’industrie » et « Territoires d’innovation », pilotés par les collectivités locales, témoignent par exemple de cet engagement public en faveur des régions, des habitants et des entreprises de province.
De leur côté, Bpifrance et la Banque des Territoires ont lancé, en septembre 2020, un ambitieux « Plan Climat commun 2020/2024 ». Avec une enveloppe de près de 40 milliards d’euros, ce programme repose sur trois piliers : accélérer, tout d’abord, la transition écologique et énergétique des entreprises et des territoires ; doubler, ensuite, les financements dédiés aux énergies renouvelables (ENR) et faire émerger de véritables champions tricolores dans ce domaine ô combien stratégique ; financer, enfin, massivement l’innovation dans les « greentechs » d’une part et, de l’autre, dans les réseaux durables et résilients.
Objectif revendiqué par Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance : s’imposer comme « un agent de transformation et d’entraînement des entreprises vers les technologies de la transition environnementale et écologique. Celle-ci constitue une opportunité majeure de création de valeur et d’emplois ».
La Banque Postale, Crédit Coopératif, BpiFrance, Banque des territoires… Plusieurs acteurs privés et publics sont au chevet de cette France périphérique qui doit radicalement changer sa manière de consommer, de se déplacer et de se chauffer. Preuve, s’il en fallait une, que la transformation écologique du pays n’attend pas les élections et les débats idéologiques des partis politiques.