À désormais un peu moins de deux ans et demi de la compétition, les collectivités territoriales sont sur le pont pour livrer à temps toutes les infrastructures de transports prévues. Mais l’inquiétude grandit, alors même que l’organisation de la finale de la Champion’s League le samedi 28 mai, s’est révélée désastreuse. Le doute subsiste en effet quant à la tenue de certains engagements, en dépit de projets déjà revus à la baisse pour beaucoup. Tour d’horizon des projets en cours, bousculés entre retards de livraison, comme les lignes 16 et 17 du Grand Paris Express, et annulation pure et simple de certains d’entre eux, dont la refonte de la Gare du Nord.
Retards sur des lignes du Grand Paris Express
Ce n’est plus un secret, les quatre nouvelles lignes – numérotées de 15 à 18 – composant le Grand Paris Express ne seront pas livrées à temps pour les Jeux Olympiques (JO). Le coup dur concerne surtout les lignes 16 et 17, qui devaient relier les sites olympiques du Nord de la capitale, de Saint-Denis au Bourget, et dont les travaux ont – officiellement – pris trop de retard à cause de la crise sanitaire. La mise en service de leurs premiers tronçons est prévue pour l’automne 2026, indique le site de la Société du Grand Paris (SGP).
Les spectateurs devront donc se contenter des rames du réseau actuel pour se rendre sur les lieux de compétition, notamment depuis la ligne 14 – qui reliera le village olympique de Pleyel à Orly, en passant par le Stade de France – dont l’extension se poursuit à bon rythme. C’est en tout cas ce qu’affirme Jean-François Monteils, le président du directoire de la SGP. Ce dernier indiquait, dans un entretien accordé à l’AFP fin avril, que la « sécurisation de l’ouverture de la ligne en mars-avril 2024 » demeurait un « objectif stratégique ». D’autant que, durant la compétition, un afflux inédit de voyageurs est attendu -estimé à 600 000 personnes chaque jour-, soit l’équivalent de ce que transporte quotidiennement le RER A. Se voulant rassurant, Jean-François Monteils précisait que, désormais, il dormait « quasiment sur une oreille et demie, ce qui [était] déjà beaucoup ».
Peur sur les flux et l’accessibilité
Face à l’afflux de voyageurs, le nombre de rames en service, mais aussi de conducteurs, est appelé à croître fortement pendant la période. Alors qu’Île-de-France Mobilités assure que la mise en circulation de rames supplémentaires est assurée, la question de la disponibilité de personnels, a fortiori en période estivale, continue de se poser sérieusement. « Beaucoup repose sur les opérateurs et sur leurs collaborateurs. Nous allons travailler avec eux pour qu’ils soient motivés et prêts pour cet événement [les Jeux Olympique, ndr] », s’est contenté de répondre Laurent Probst au magazine « Parigo ».
En vue de Paris 2024, les pouvoirs publics se sont également fixé l’objectif de rendre toutes les gares franciliennes accessibles, c’est-à-dire adaptées aux personnes à mobilité réduite. D’importants chantiers ont déjà été entrepris et livrés, notamment des passerelles, des ascenseurs et des marches-pieds, pour un coût total de plus d’un milliard et demi d’euros. Pour autant, force est de constater que les travaux de mise aux normes progressent lentement : à ce stade, il reste 84 gares à rendre « accessibles » avant 2024, selon le magazine « Parigo ». En 2019 et 2020, ce sont seulement 21 gares qui ont été réhabilités en ce sens, d’après la même source.
Abandon de l’ambitieux projet de la Gare du Nord
Dans le domaine des grands projets urbain, là encore, les difficultés s’accumulent. Parmi les projets-phares revus à la baisse, le plus emblématique est sûrement celui de la Gare du Nord. Initialement, le site devait faire l’objet d’une rénovation de fond en comble, qui prévoyait le triplement de sa surface, pour un montant d’environ 1,5 milliard d’euros. Et surtout, StatioNord – le nom du projet initial – avait pour mission de redorer l’image d’un arrondissement miné par l’insécurité et l’insalubrité. Mais aussi de préparer la Gare du Nord à l’augmentation du trafic, 900 000 voyageurs par jour étant attendus d’ici 2030, contre 700 000 aujourd’hui.
Initialement prévu pour être livré avant les Jeux Olympiques, le projet porté par la filiale immobilière du groupe Auchan, Ceetrus, et la SNCF a fait l’objet d’intenses négociations et d’atermoiements de la Mairie de Paris, qui l’ont fortement décalé dans le temps. En septembre 2021, la Mairie de Paris annonce finalement mettre fin au projet. Enfin, en mars, la SNCF a dévoilé son plan B – baptisé « Horizon 2024 » – avec en ligne de mire une première livraison avant la Coupe du monde de rugby 2023, qui s’étalera de septembre à octobre 2023. Mais le projet est jugé largement cosmétique par de nombreux observateurs. En effet, là où Stationord s’engageait à séparer les flux de voyageurs pour faire face à l’augmentation de la fréquentation à venir, Horizons 2024 devrait se limiter à la signalétique. D’autres redimensionnements -à la baisse- par rapport à l’ancien projet sont aussi à souligner. L’espace à vélo sécurisé ne sera ainsi plus dimensionné plus que pour 1 000 vélos, contre 2 000 avec StatioNord, l’ambition de créer un espace vert accessible de plus d’un hectare sur la nouvelle toiture n’est plus à l’ordre du jour et la création de surfaces à usage mixte (bureaux, restauration, commerces) destinées à financer le projet est abandonnée.
Périphérique plus vert… et moins fluide ?
Le comité olympique et la Ville de Paris ont affirmé à maintes reprises leur ambition de profiter de la grand-messe du sport international pour rendre la capitale plus vivable, donc plus écologique. La promesse qu’aucun spectateur n’ait à se rendre sur un site de compétition en voiture participe de cela.
Dernièrement, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a dévoilé un nouveau projet de périphérique « plus vert » pour les JO, et au-delà. S’agissant de la période de compétition, la Ville de Paris a confirmé qu’une « voie olympique » – dans les deux sens de circulation – serait créée. À en croire David Belliard, elle pourrait être par la suite remplacée par des espaces verts. L’adjoint d’Anne Hidalgo en charge des mobilités – élu EELV – a réaffirmé il y a peu la volonté de la collectivité territoriale de transformer le périphérique en « ceinture verte », en passant à un modèle « 2 x 3 voies » contre « 2 x 4 » actuellement, sur la plupart des tronçons.
Compte tenu des difficultés enregistrées pour fluidifier les transports en communs franciliens, et de l’encombrement quasi-permanent du périphérique aux heures de pointe, nul doute que cette nouvelle ambition affichée par Anne Hidalgo fera débat. Et cristallisera un peu plus les oppositions entre automobilistes et partisans de la mobilité douce.