Après plusieurs mois de négociations, le gouvernement a rendu public, fin novembre, le contenu de la future RE2020 qui sera mise en œuvre à partir de l’été 2021. Cette nouvelle réglementation vise principalement à réduire les émissions carbone du secteur du bâtiment, tout en réduisant le coût énergétique du bâti neuf.
Le 24 novembre 2020, les arbitrages définitifs de la Réglementation environnementale 2020 (RE2020) ont enfin été dévoilés par Barbara Pompili et Emmanuelle Wargon, respectivement ministres de la Transition écologique et du logement. Lors d’une conférence de presse, les deux membres du gouvernement ont présenté les principales orientations du nouveau texte de référence en matière de construction neuve, dont l’entrée en vigueur a été repoussée à l’été 2021. Alors que d’ultimes ajustements pourront avoir lieu d’ici là, notamment au regard des expérimentations menées depuis quatre ans sur le terrain, la RE2020 n’est pas une simple réglementation de plus dans l’arsenal législatif français. Succédant à la RT2012, elle marque un tournant majeur dans le secteur bâtimentaire afin de construire de nouveaux logements à la fois sobres en énergie et en émissions de CO2. « Les bâtiments, du fait de leurs consommations d’énergie mais aussi de la façon dont nous les construisons, représentent une part conséquente des émissions de gaz à effet de serre en France. Grâce à la réglementation environnementale 2020, nous accélérons la décarbonation de ce secteur en agissant sur la phase de construction qui, pour un bâtiment neuf performant, représente entre 60 % et 90 % de son impact carbone total. D’ici 2030, la réglementation fera baisser cet impact de plus de 30 % », s’est félicitée Barbara Pompili.
« Le quart du parc de logements de la France de 2050 n’est pas encore construit, a rappelé, quant à elle, Emmanuelle Wargon. Ces futures constructions neuves se doivent d’être à la fois durables pour notre planète et de qualité pour leurs occupants. À travers la réglementation environnementale 2020, c’est donc une grande transformation qui s’engage, progressive et déterminée, pour toute la filière constructive. » Concrètement, la future RE2020 prévoit de « donner la priorité à la sobriété énergétique et à la décarbonation de l’énergie » dans le bâti neuf, mais aussi à « diminuer l’impact carbone de la construction des bâtiments […] en prenant en compte l’ensemble des émissions du bâtiment sur son cycle de vie » et en « construisant plus souvent puis systématiquement avec du bois et des matériaux biosourcés ». Cette orientation prévoit ainsi l’abandon des énergies fossiles, et notamment les systèmes de chauffage au gaz, au profit d’énergies décarbonées (électriques et/ou renouvelables) dans la construction de maisons dès l’été 2021 ainsi que de manière plus progressive dans les logements collectifs. Enfin, réchauffement climatique oblige, la RE2020 introduit le concept de « confort d’été » dans la loi française afin de « garantir la fraîcheur en cas de forte chaleur ».
RE2020 : des orientations attendues de longue date
Selon les membres du gouvernement, les évolutions apportées par la RE2020 « ne sortent pas de nulle part ». « Depuis plusieurs mois, voire années, la direction à choisir pour la décarbonation des énergies était claire, quand on lit par exemple la stratégie nationale bas carbone (SNBC) publiée en 2019, indique le ministère du logement. En matière d’impact carbone de la construction, le fait que la RE2020 s’y attaque était programmé depuis cinq ans avec la loi de la transition énergétique pour la croissance verte (2015). Les acteurs [du secteur bâtimentaire] ne découvrent pas cela. » Une précision en guise de réponse à la filière fossile et carbonée, qui a bataillé jusqu’au bout pour conserver le gaz comme source de chauffage dans le neuf.
Initié depuis 2015, l’adoption de la RE2020 a déjà fait l’objet de nombreux débats et concertations, et poursuivra une trajectoire progressive, par palier, dans sa mise en œuvre avec des exigences rehaussées en 2024, 2027 et 2030. Cette transition interviendra à « coûts maîtrisés », à en croire le gouvernement, qui anticipe des surcoûts inférieurs à 10 % à l’horizon 2030 et de l’ordre de 3 à 4 % dans l’immédiat, contre 10 à 15 % lors de l’élaboration de la RT2012. Or, ces derniers « ne s’étaient que faiblement matérialisés et avaient été rapidement absorbés par les effets d’apprentissage », affirme le ministère de la Transition écologique…
De manière générale, les acteurs du bâtiment ont donc plutôt bien accueilli les dernières annonces relatives au contenu de la RE2020. « La trajectoire est claire, c’est maintenant au secteur du bâtiment dans son ensemble de la suivre », estime Rodrigue Leclech, responsable du pôle construction au bureau d’études Pouget Consultants, qui trouve « pertinent d’avoir une trajectoire fixée dès aujourd’hui pour la décennie d’actions à venir afin de donner du temps à toutes les filières de s’adapter et aux acteurs de se préparer sur la baisse des émissions carbone et sur le confort d’été. » Même constat enthousiaste du côté de Luc Charnasson, président du Comité stratégique de la filière bois, qui « consid[ère] avoir été entend[u] dans une compétition quand même assez rude ». Et qui croit aux effets bénéfiques de la RE2020 sur le dynamisme et l’emploi dans la filière bois. « Cela va dans le bon sens, même si nous aurions souhaité que cela débute bien plus tôt […]. Les capacités de production sont là, même si bien entendu il faudra les adapter en embauchant du personnel. Et si le marché se développe, la RE2020 va encourager nos industriels à investir et à se moderniser, à rénover leur parc de matériels et d’équipements pour être plus productifs. »