Boosté par la crise sanitaire, l’usage de la voiture fait de la résistance pour les trajets entre le domicile et le travail. À mi-chemin entre le véhicule individuel et les transports en commun, le covoiturage constitue une solution d’autant plus privilégiée que les entreprises repensent durablement leur politique de mobilité…
Si 2020 a rimé avec l’explosion du télétravail en France, des millions de salariés ont continué à se rendre sur leur lieu de travail. Pandémie et distanciation sociale obligent, près d’un tiers des Français (31,5 %) ont ainsi dû modifier leurs habitudes de mobilité pour les trajets domicile-travail, d’après l’étude réalisée cet été par la startup Worklife. Parmi eux, plus de la moitié (56,5 %) ont privilégié les modes de transport doux, comme le vélo (29,6 %), les transports en commun (10,7%) ou la marche (7,9 %). Mais le vrai gagnant n’est autre que la voiture personnelle, que 39,1 % d’actifs ont choisie comme nouveau moyen de déplacement professionnel pendant la crise sanitaire. Ce regain de popularité pour l’automobile pourrait sembler, à première vue, paradoxal alors que, dans le même temps, 85 % des Français se déclarent sensibles aux questions environnementales, d’après le même sondage. Mais si la désaffection de la moitié des sondés pour les transports collectifs – 50,6 % veulent les utiliser moins qu’avant ou plus du tout – explique en partie le plébiscite nouveau pour la voiture, tout n’est pas négatif sur le front de l’écologie, au contraire.
D’après l’étude de Worklife, la crise aurait même accéléré la transformation des politiques de mobilité des entreprises. Cette évolution se traduit notamment par le déploiement du Forfait mobilité durable (FMD) par les employeurs, qui permet au salarié de bénéficier d’une prise en charge des modes de transports doux pouvant aller jusqu’à 400 euros par an. Parmi les pionniers en la matière, EDF n’a pas attendu le premier confinement pour mettre en œuvre des solutions favorisant la mobilité durable de ses collaborateurs. Ces dernières années, le Groupe a ainsi déployé des plans vélo et mobilité électrique afin de développer ces pratiques pour les déplacements entre le domicile et le travail. Les nouvelles modalités de travail – en flex-office, à distance ou déporté sur un site plus proche – font également partie d’un plan adopté dès 2016 par l’entreprise française et s’inscrivent également dans le nouvel accord sur la mobilité durable signé en novembre 2019. Autant de flexibilités qui ont pris tout leur sens pendant la crise sanitaire. Parmi les nouveautés, un Forfait mobilité durable covoiturage de 200 euros par employé et par an a été mis en place afin de limiter l’impact de la voiture individuelle en la partageant entre collègues, dans le respect des gestes barrière. EDF s’inscrit ainsi dans le cadre de la stratégie nationale pour le développement de la mobilité propre, adoptée en 2016 par le gouvernement, qui fait du covoiturage l’un des modes de déplacement à développer en priorité en France.
Après le déconfinement, EDF a encore accéléré son engagement en lançant une réflexion pour « Travailler autrement, manager autrement ». Conformément à son ambition d’atteindre la neutralité carbone, l’énergéticien accompagnerait ainsi ses salariés dans l’objectif de « moins et mieux se déplacer » en proposant, entre-autre, des solutions de mobilité adaptées à un maximum de situations. « Engagé pour le climat et la mobilité durable, le groupe EDF multiplie des solutions respectueuses de l’environnement et propose des modalités de travail qui simplifient la vie des salariés, tout en étant au service de la performance collective. Ces dispositifs prennent encore plus de sens depuis la crise sanitaire qui nous conduit à penser différemment et à accélérer la transformation de nos méthodes de travail, dont les déplacements, ainsi que les modes de management.» analyse le Directeur des RH du groupe Christophe Carval.
Le potentiel gigantesque du covoiturage de proximité
Populaire sur les longs trajets, le covoiturage pour les trajets domicile-travail est encore très peu répandu en France. Cet état de fait pourrait bien changer. Dans toutes les régions ou presque, des services de covoiturage innovants se développent. En Bretagne, un nouveau dispositif opéré par Keolis, en partenariat avec la société Ecov, va ainsi voir le jour en février 2021 dans la métropole de Rennes. Le principe : mettre en relation conducteurs et passagers sur une ligne régulière de 30 km jalonnée par six arrêts stratégiques. Baptisé Star’t, ce système accessible par application et panneaux d’affichage rémunère les conducteurs un euro par trajet, qu’ils prennent un passager ou non, et propose aux passagers des gratifications sous forme de cadeaux. Il doit, à terme, permettre de réduire le nombre de véhicules circulant sur cet axe très emprunté par les automobilistes, mais pas suffisamment pour y créer une ligne de bus. Au Pays Basque, une application gratuite et bilingue favorise également le covoiturage pour réduire les embouteillages ainsi que la facture énergétique et l’empreinte carbone. Développée par Mobicoop, Txik Txak Kovoit’ permet depuis le 30 novembre dernier à ses utilisateurs de trouver un conducteur ou un passager en recherchant les covoiturages prévu à proximité ou en temps réel. Là aussi, les conducteurs sont indemnisés, mais par rapport au nombre de kilomètres parcourus et de personnes prises en charge.
Ces dernières années, de nombreux acteurs se sont ainsi positionnés sur ce marché très prometteur du covoiturage de proximité. Avant la pandémie de coronavirus, 23,2 millions de Français quittaient chaque jour leur domicile pour se rendre sur leur lieu de travail, selon l’INSEE. Parmi eux, 70 % utilisaient leur voiture et conduisaient pour la plupart seuls dans leur véhicule. Rien qu’en région parisienne, le Syndicat de transport Île-de-France Mobilités (ex-SDIF) travaille désormais avec BlaBlaLines (BlaBlaCar), Covoit’ici (Ecov), IDVROOM (SNCF), Karos, Klaxit, Ouihop et Roulez malin pour rendre le covoiturage gratuit lors des épisodes de pollution. Même l’acteur historique des transports régionaux, Transdev, s’est associé à Karos pour proposer une solution de mobilité aux 38 000 salariés de l’aéroport de Toulouse-Blagnac. Une tendance majeure, qui répond aux attentes tout aussi fortes des employés pour réduire le temps et l’argent consacrés aux trajets professionnels, et ainsi parvenir à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée. « Le lien entre marque employeur et politique de mobilité se développe. Et la pandémie que nous connaissons va accélérer la prise en compte de ce que les salariés souhaitent en matière de transport, estime Patrick Dumoulin, créateur du label Great Place to Work. Pour cela, le gestionnaire de flotte va devoir aller plus loin que la seule gestion de la voiture en misant sur le covoiturage, le vélo, etc. […] L’attractivité d’un employeur va donc passer par le développement du nombre de solutions de transport. »