Vivre dans une ville moche aurait des conséquences négatives sur notre bien-être et notre santé mentale. C’est ce que suggèrent des architectes, neurologues et activistes depuis plusieurs années. Pour le démontrer de façon scientifique, l’université de Cambridge a décidé de mener une étude afin d’établir un lien direct entre l’apparence d’un bâtiment et une réaction psychologique.
Avec la croissance démographique et l’exode rural, les villes s’étendent de plus en plus en largeur comme en hauteur. Si certaines métropoles prennent soin de mettre en place une politique d’urbanisme adaptée à nos besoins nouveaux, en termes d’espaces ou de végétation notamment, la plupart ne le font pas.
Jan Gehl et Jane Jacobs en pionnier
Ainsi, il y a de plus en plus de villes qui dégagent une sensation d’étouffement et de malaise, avec des buildings toujours plus haut, le bitume partout ainsi que des couleurs ternes. Ce décor morose aurait un effet négatif sur notre bien-être, pas toujours perceptible immédiatement. Dans les années 1960, l’architecte danois Jan Gehl et l’activiste américaine Jane Jacobs avaient déjà affirmé que le côté inhumain des villes impacte directement notre santé.
Une ville moche provoquerait un malaise
Selon ces chercheurs, l’architecture laide des villes peut se voir dans leurs étalements stériles et leurs voies rapides agressives notamment. Ce côté « inhumain » provoquerait un malaise et un mal-être chez le citadin. Mais Jan Gehl et Jane Jacobs manquaient alors de preuves tangibles, relève Slate dans un article sur le sujet. Il leur fallait s’appuyer sur des cas d’études spécifiques et des problèmes réels.
Les bâtiments laids peuvent entraîner une neuro-inflammation
C’est ce que tente de faire l’université de Cambridge, au Royaume Uni. Cette vénérable institution britannique du savoir mène en ce moment une étude afin d’évaluer si certaines façades de bâtiments peuvent entraîner une neuro-inflammation, une réaction pathologique commune à plusieurs maladies du cerveau. En d’autres termes, elle cherche à établir un lien direct entre l’apparence d’un bâtiment et un mécanisme psychologique.
La neuro-architecture s’intéresse à l’impact de l’esthétique des bâtiments sur notre cerveau
Au Canada, l’université de Waterloo mène également une étude sur le lien supposé entre l’esthétisme d’une ville et la santé mentale de ses habitants. Cette relation hypothétique entre l’apparence des bâtiments et le bien-être des résidents a donné naissance à ce qu’on appelle la neuro-architecture, une discipline incarnée par Colin Ellard.
Une étude The Lancet de 1992 évoquait déjà le lien entre ville moche et schizophrénie
En attendant les résultats des travaux des universités de Cambridge et de Waterloo, relevons qu’une étude publiée dans la revue The Lancet en 1992 (déjà) avançait que les personnes ayant grandi dans un milieu urbain dense (dans une ville de 50.000 habitants par exemple) ont un risque plus élevé de souffrir de schizophrénie à l’âge adulte, que celles ayant évolué dans un milieu urbain moins dense.
Les zones fortement urbanisées, terreau des pathologies dépressives
The British journal of psychiatry démontre aussi, dans une analyse menée sur 4,4 millions de personnes, que les personnes vivant dans une zone fortement urbanisée sont susceptibles de souffrir davantage de pathologies dépressives. Cette hypothèse pourrait expliquer pourquoi on trouve moins de gens atteints de troubles mentaux dans les campagnes.
Moins de centenaires dans une ville moche et dense
Dans ces zones rurales, où la nature et les grands espaces abondent, on se sentirait plus épanoui, plus calme et plus proche les uns des autres. Cette atmosphère sereine et conviviale influerait aussi sur la longévité. Elle expliquerait en partie pourquoi on trouve de nombreux centenaires à la campagne ou dans les villes moins moches et denses.